vendredi 7 février 2014

Walter Benjamin - Notes sur Baudelaire

p371

La modernité, c'est le transitoire, le fugitif, le contingent, la moitié de l'art, dont l'autre moitié est l'éternel et l'immuable...Pour que toute modernité soit digne de devenir antiquité, il faut que la beauté mystérieuse que la vie humaine y met involontairement ait été extraite.

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Dans chaque oeuvre d'art véritable, il existe un lieu où celui qui s'y installe ressent un souffle frais pareil au vent d'une aube qui va poindre. Il en résulte que l'art, considéré souvent jusqu'ici comme réfractaire à toute relation avec le progrès, peut servir l'authentique finalité de celui-ci. Le progrès ne se situe pas dans la continuité du cours du temps, mais dans ses interférences: là où pour la première fois quelque chose de véritablement nouveau se fait sentir avec la sobriété de l'aube.

p418
Pour saisir la signification de la nouveauté, il faut revenir à la vie quotidienne. Pourquoi tout le monde communique-t-il à autrui la dernière nouvelle? Vraisemblablement pour triompher des morts. Mais juste quand il n'y a rien de vraiment nouveau.

Le "moderne", le temps de l'enfer. Les châtiments de l'enfer sont toujours la dernière nouveauté qu'il y a dans ce domaine. Il ne s'agit pas de dire qu'il se passe "toujours la même chose", encore moins qu'il serait question ici d'éternel retour. Il s'agit au contraire de dire que le visage du monde, précisément sous l'aspect de la dernière nouveauté reste toujours en tous points la même chose. - C'est ce qui constitue l'éternité de l'enfer. Déterminer la totalité des traits sous lesquels la "modernité" se manifeste, ce serait représenter l'enfer.